Intersol’2022 - SCE intervient au congrès international sur les Sols, les Sédiments et l’Eau
Sce
Notre approche sécuritaire pour gérer les sites pollués est-elle toujours « durable » ?
Voici le sujet présenté par Julien Toutain, Responsable Sites Pollués, Industries et Déchets au sein de Sce, lors du 21e édition du congrès Intersol’2022 qui se déroulera du 21 au 23 juin à Lyon.
Cette intervention a lieu durant la conférence sur les « Enjeux et risques sanitaires, environnementaux et socio-économiques », programmée le jeudi 23 juin à 16h20. Découvrez le résumé de son intervention.
Notre approche sécuritaire pour gérer les sites pollués est-elle toujours « durable » ?
A l’heure où notre société multiplie les réflexions et les actions en faveur de la protection de l’Environnement en considérant les enjeux et les besoins sur le long terme, peut-on considérer que la gestion des sites et des sols pollués s’inscrit dans une démarche aussi vertueuse ?
En tant que professionnel, nous rencontrons quotidiennement des situations qui nous amènent à nous interroger. Si les mécanismes ayant engendré ce constat sont probablement complexes, 2 éléments l’expliquent en partie :
1. Il n’existe pas en France de définition partagée de la notion de « Pollution ». Cette notion est régulièrement abusivement confrontée à la notion de « Dangerosité » qui est définie différemment selon les référentiels sollicités (santé, déchets, …)
2. La méthodologie des sites et des sols polluées a été construite il y a une trentaine d’années pour répondre à des enjeux de gestion de passifs industriels alors que nous sommes aujourd’hui davantage face à la gestion d’un passif « urbain » plus diffus et hétérogène. Appliquer les mêmes méthodes sur des objets différents est-il adapté ?
Pour illustrer ce questionnement et ses conséquences, nous proposons de partager une partie de notre retour d’expérience.
L’approche de gestion de « Sites et Sols Pollués » est aujourd’hui basée sur la maîtrise des pollutions concentrées et/ou des risques sanitaires. Dans le cas où l’une et/ou l’autre des thématiques est identifiée et avérée sur un site, des mesures de gestion sont à mettre en œuvre.
Concernant la notion de « Dangerosité », l’application systématique d’une approche sécuritaire établie sur la base de données présentant des incertitudes, ne conduit-elle pas à une surconsommation de ressources pour dépolluer et/ou protéger ? Comment évaluer cet impact de façon absolue en l’absence de référentiel commun ? Ainsi, la gestion du risque immédiat est-elle durablement compensée/efficace ? Cette question semble légitime au regard par exemple de la fréquente préconisation du recouvrement simple de sols par des revêtements minéraux ou de la terre végétale provenant de zones rurales (démarche de protection des ressources, limitation de l’extension urbaine, ZAN, …). En outre, au-delà de la sollicitation de ces ressources non renouvelables, nous observons que leur mise en œuvre pose question après usage sans prise de recul sur leur forme ou leurs caractéristiques chimiques intrinsèques.
Concernant la méthodologie de gestion des sites et sols pollués, elle vise en premier lieu à la gestion des pollutions concentrées. Or, dans un contexte urbain plus diffus et aux sources potentielles de pollution moins identifiables que dans un contexte industriel, les incertitudes liées à la caractérisation ponctuelle des sols (hétérogénéité des sols, ponctualité des échantillons/des analyses) permettent-elles de statuer sur une « qualité représentative » au regard des seules analyses ? Compte tenu des enjeux liés à la préservation des ressources non renouvelables comme le sol, une caractérisation ponctuelle ne semble-t-elle pas limitée ? Quel poids donner à la représentativité de l’analyse ponctuelle ? Quels sont les contaminants à enjeux (faction soluble, forme ionique, …) ?
Dans ce contexte, une approche contextualisée et plus globale serait davantage appropriée pour expliquer les résultats et adapter une méthode de gestion adéquate. Enfin, cette prise de recul, voire ce besoin d’ouverture méthodologique (écotoxicologie, biodisponibilité, polluants émergeants, …), sont-ils aujourd’hui possibles considérant la temporalité des études et la forte concurrence du marché sur les sites et les sols pollués ?
En contexte urbain, l’approche convenue ne doit-elle donc pas évoluer vers une approche globale plutôt qu’une approche systématique, souvent plus couteuse environnementalement, socialement et économiquement, et moins attrayante pour nos techniciens ?